Résumé des épisodes précédents : Tomtom et Clairette attendent impatiemment la livraison de deux nouveaux winches à Baltimore. Outre l’occupation procurée par quelques bricolages rigolos, ils en profitent pour se promener…
Baltimore, c’est un joli petit bourg, dont l’activité, semble-t-il, est essentiellement tournée autour de la pêche, des cours de voile et de dériveur, de la balade de touristes vers les îles ou pour des « Seafari » sur bateau moteur qui pue et qui fait du bruit et des vagues surtout quand il passe à 5 m des bateaux au mouillage, ou encore de la Guinness, cf. ses trois pubs sur la place et l’animation conviviale qui y règne tous les soirs.
Quelques petits détails dans le bourg : un vieux château, du XIIème siècle si mes souvenirs sont bons, abandonné depuis le XVIIème et rénové en 2005 (on n’a pas visité, mais de l’extérieur, il a de la gueule), quelques maisons très colorées sur la place (de près, la maison rose vif c’est un peu trop rose, mais de loin, avec l’ensemble des maisons colorées, c’est chouette), une petite église en pierre…
Bref, Baltimore c’est pas mal mais on a trouvé son fish & chips porte close par deux fois donc on s’est dit qu’on allait visiter un peu plus loin en attendant l’arrivée des winches.
Direction tout d’abord un minuscule mouillage, Horseshoe Harbour, sur l’île Sherkin (c’est juste à côté). Littéralement, pour les non anglophones, ça veut dire « port du fer à cheval ». Il porte très bien son nom, et du coup il est très protégé des vents car il est très encaissé, et de la houle car l’entrée est minuscule et bien orientée (i.e pas plein ouest !) : un mouillage tout calme, idéal, le panorama est superbe, que demande le peuple ? Qui a dit « une eau à plus de 15°C et sans méduses ? » (oui, elles sont folles les méduses irlandaises, elles pullullent dans les eaux très froides. Et tant qu’on y est, la note culturelle : en anglais on dit « jellyfish » pour méduse, je trouve que le mot est vraiment bien choisi…)
Faut juste réussir à entrer dans le Horseshoe, et pour ça, faut serrer les fesses (et oser passer à 5 m de la côte quand le sondeur indique 17 m). C’est vraiment pas grand comme entrée, et en plus sous l’eau c’est blindé de cailloux à droite, puis à gauche… Heureusement on avait bien préparé la nav !
On est restés deux nuits à Horseshoe, on en a profité pour se balader dans Sherkin, pour dormir, pour bricoler, pour faire du pain…
Sherkin, donc : jolie petite île, pas très touristique, donc pas trop de monde. Des petites routes pas très souvent entretenues, de moins en moins lorsqu’on part vers l’extrémité Ouest de l’île, les voitures (assez rares) sont adaptées au terrain : il semblerait que le contrôle technique soit une formalité absolument inconnue par ici. Il y a quand même un ou deux pubs, une école, des maisons, des gens qui y vivent à l’année. Quelques jolies photos au passage :
Une dernière photo pour Sherkin : on en profite pour vous présenter notre petit dernier, Firmin. Il est arrivé parmi nous juste avant le départ, depuis il nous tanne pour qu’on aille voir des morses dans le Grand Nord, mais c’est pas au programme, il a appris à se contenter des phoques que l’on croise de temps en temps…
On avait encore un peu de temps avant l’arrivée des winches (compter le we, plus le lundi férié en Irlande, plus l’adresse incomplète – il manquait la ville – et vous obtiendrez un délai un peu long), donc on est allés (NDTLGP : moi je mettrais pas de « s », mais bon) mouiller à Cape Clear, au Sud de l’île, un mouillage qui nous paraissait pas mal sur la carte. Certes, les instructions nautiques disaient qu’il ne protégeait pas du tout de la houle du large, mais bon, quand même, ça a l’air pas mal, non ? et puis c’est les instructions nautiques des rosbifs, alors …
Notre petite nav s’est faite en bonne partie à la voile, grâce au vent qui venait du bon côté pour qu’on puisse utiliser notre winch bâbord. On a bien essayé d’utiliser le même winch pour l’autre bord, mais l’écoute passait sur le pont et semblait y générer des efforts qu’il n’est pas fait pour supporter, donc hors de question de border comme des malades, et le cap s’en est ressenti. Au passage, ce fut l’occasion de tester pour plus de 5 minutes Corentin le numéro 1. Verdict : ça tient par 20 noeuds avec rafales à 25 pendant 2h, faudra remonter là haut pour voir si le bout tient le coup, mais a priori on valide …
Bref, arrivée dans le mouillage de Cape Clear, on améliore petit à petit notre technique de mouillage, en laissant descendre l’ancre et la chaîne jusqu’à ce que l’ancre touche le fond, puis en déroulant le restant de chaîne avec une légère marche arrière, ce qui permet à la fois à l’ancre de prendre la bonne direction pour accrocher le sol, et à la chaîne de se dérouler tout en longueur plutôt que de faire un tas au fond. Essai de marche arrière pour vérifier qu’on accroche bien : ça marche pas mal (sinon, faut remonter l’ancre, se repositionner sur un endroit sympa à la bonne profondeur et à la bonne distance des côtes, redescendre l’ancre… C’est pas très fatigant grâce à notre guindeau électrique, mais c’est long).
Il semblerait que les instructions nautiques, toutes anglaises qu’elles soient, avaient raison. Schnaps danse au mouillage, c’est n’importe quoi, cette houle qui vient de travers par rapport au vent… Il y aurait vraiment de quoi avoir le mal de mer si je n’avais pas décidé de m’entraîner à faire une épissure sur une chute de cordage. Ca m’a bien pris 3 heures pour arriver à la dernière étape (jamais réussie, la dernière, le bout n’était pas assez neuf…), ça m’a bien occupée, j’étais suffisamment concentrée pour oublier le roulis démesuré engendré par la houle.
Sur Cape Clear, nous avions prévu d’aller faire un tour au camping pour acheter des jetons pour prendre une douche (le lavage à la bassine, c’est bien, ça consomme pas beaucoup d’eau, mais un bon rinçage généreux ça peut être pas mal de temps en temps), et d’aller faire quelques courses alimentaires éventuellement. Ce furent deux demi-échecs. Nous n’avons pas trouvé le gérant du camping, donc pas de jeton, donc pas d’eau. Mais on ne s’arrête pas là, nous (enfin j’en connais un qui se serait bien arrêté là ) : heureusement, on avait un mini-seau sous la main, type seau de plage pour enfant, et pendant que l’un se savonnait, l’autre remplissait le seau au lavabo pour l’apporter à l’autre, et recommençait jusqu’à ce que le rinçage soit complet. C’était de l’eau froide, les douches n’étaient pas bien propres, c’était pas pratique, mais on était propres !!!
Quant aux courses, le seul magasin était assez peu achalandé, et suffisamment cher (on est sur une île, faut pas l’oublier) pour qu’on décide que nos stocks de frais tiendraient bien le coup encore quelques jours.
Cape Clear c’est donc une île plus touristique que Sherkin, et pour nous qui n’aimons pas vraiment la foule, ce fut un peu surprenant de croiser les jeunes d’une colo ou des ferries débarquant des touristes dans un endroit que nous pensions tout calme et peu fréquenté… On a quand même fait une jolie petite balade vers un vieux château (Tomtom avait lu quelque part que c’était un phare mais sur la carte c’est écrit que c’est un château) en ruine, les pieds tous mouillés, tant pis, on a une buanderie pour faire sécher les chaussettes et les chaussures (ça marche trop bien, vive la buanderie !!).
Il faut également reconnaître à Cape Clear la beauté de ses falaises à l’entrée de notre mouillage branlant :
Nous avons donc quitté Cape Clear, direction Crookhaven. Il faut dire que cette fois, nos impressions au vu de la carte et les instructions nautiques étaient assez d’accord : le mouillage serait confortable. Et puis j’avais une invitation de la part d’un architecte local, rencontré pour le boulot, à passer le voir là-bas cet été, c’était l’occasion d’en profiter.
Nous sommes passés autour du Fastnet pour aller vers Crookhaven : Tomtom avait promis à ce – tout de même mythique – bout de rocher au milieu de l’eau, orné d’un fort joli phare qui signale l’extrêmité Sud-Ouest de l’Irlande de revenir le voir (NDTLGP : ça n’avait pas marché en 2007 vu que le coup de vent de force 8-9 annoncé en mer Celtique à ce moment avait fait renoncer à l’équipage dont je faisais partie à aller en faire le tour en course), et ma foi, ça valait le détour.
Crookhaven, donc : une longue baie formée au Nord par le continent – enfin, l’Irlande – et une bien jolie colline, au Sud par une avancée de terre sur laquelle se trouve le village de Crookhaven, et fermée à l’Ouest par une petite bande de terre qui cache Barley Cove, une plage chère aux surfeurs.
On était vraiment à notre aise dans ce mouillage, donc on y est restés quelques jours. D’autant plus qu’en surveillant le site d’UPS pour la livraison de nos winches, on voyait bien qu’ils n’avaient pas encore atteint Baltimore.
Paul et Sally, nos architectes irlandais, nous ont réservé un accueil très agréable. Mine de rien, c’est pas mal de rencontrer des gens du coin, pour en savoir un peu plus sur l’histoire du lieu (une usine de homards construite puis abandonnée par des français par exemple, des carcasses de vieux bateaux en bois faisant la liaison avec la Bretagne mal ancrés et qui se retrouvent échoués sur une plage), sur les bons restaus, sur la coopérative qui vend du fromage irlandais pas mal… Et aussi pour améliorer notre anglais, surtout le mien, qui laisse encore à désirer.
Bref, nous avons décidé, un matin, d’enfourcher notre fidèle annexe jusqu’à Crookhaven, de faire le tour de la baie à pieds en passant par Barley Cove, de monter à la coopérative et d’y refaire notre stock de laitages, et de redescendre. On a presque respecté le plan initial… Jusqu’à Barley Cove, on a bien suivi le chemin prévu…
Chemin faisant, quelques rencontres avec la faune (et oui, cette fois, des bestioles, pas que des fleurs) :
Jusque là, donc, tout allait bien. Mais on s’est rendus compte qu’on avait dû aller trop loin, la route ne prenait pas la direction qu’on attendait. Ni une ni deux, comme on n’aime pas faire demi-tour, on a décidé de monter sur la crête de la colline. Ce n’est pas très haut, nous étions bien chaussés, bien sûr il y aura des kékés, c’est forcé, mais ça devrait le faire. Ca l’a fait : en grimpant sur des murets de pierre, en cherchant le chemin des vaches, nous sommes parvenus à la crête.
De là-haut, c’était vraiment joli, on n’a pas regretté notre ascension peu conventionnelle (même si on s’est rendu compte après coup qu’en fait la route qu’on avait prévu de prendre était bien plus loin !) :
Nous avons finalement retrouvé une des routes que nous avions prévu d’emprunter, mais vu l’heure, il n’était plus temps de pousser jusqu’à la coopérative (dommage…), il fallait redescendre. Un croisement, nous décidons de prendre la route qui descend le plus, on dirait que ça mène vers des maisons, on trouvera bien quelqu’un pour nous indiquer la bonne direction ! Erreur : la route s’arrête, près de maisons certes, mais les maisons sont vides. Comme on n’aime pas faire demi-tour (bis repetita ), et comme on n’a pas envie de remonter la route goudronnée qu’on vient de descendre sur au moins … 100 m, on cherche un raccourci dans les fourrés. Et on trouve !
Et on entame la descente…
Bilan : les ronces irlandaises sont bien nourries, elles montent jusqu’à deux mètres de haut, elles piquent et arrachent peau et vêtements comme c’est pas permis…
On a fini par retrouver la route (c’est beaucoup moins drôle de marcher sur la route), et par redescendre vers Crookhaven pour finir la journée autour d’une pinte et d’un repas bien mérités.
Vous l’attendiez, étant donné le titre, cet article se termine à Baltimore. Et comme on n’a pas pris le même chemin qu’à l’aller, je vais raconter le retour…
On a donc navigué à la voile, au portant, vent dans le dos. J’étais toute perturbée, j’ai pas l’habitude, avec Schnaps on n’a que du vent contraire, en général… En tous cas ça avance assez vite, on s’approche du passage dans le Sound, ça tombe bien il faut passer le Sound avec la marée. Tiens, le vent faiblit… Tiens, va falloir mettre le moteur si on veut passer avec la marée (ou du moins éviter de passer contre)… C’est donc avec l’aide de Dédé le XUD que nous avons fait les derniers milles nous rapprochant du Sound. C’est très très joli, le Sound : des bouts d’îles partout, des rochers un peu partout aussi, oh tiens, un phoque qui sort la tête !! Mais il faut connaître, ou avoir bien étudié la carte, ou savoir faire demi-tour très vite, pour prendre les passages qui ne sont pas minés, et enfin arriver, voiles + moteur (le vent s’est remis à souffler, entre temps), dans la baie de Baltimore.
Nous étions un peu fatigués, un peu inquiets pour nos winches qui avaient été livrés mais on ne savait pas trop où (toujours ce souci d’adresse incomplète), donc mise à l’eau de l’annexe, mise en route du petit moteur, voilà Tomtom qui part vers le bourg pour mener l’enquête, tandis que Clairette reste à bord pour surveiller que le bateau voisin, qui mouille quand même vachment près, ne vient pas nous dire bonjour. Et là, dans la lumière de la fin d’après-midi, une prame des Glénans s’approche de l’annexe qui s’éloigne dans le vrombissement de son moteur 2 ch (qui démarre désormais au presque 1/4 de tour). A son bord, Tom, le gars des Glénans qui nous a donné l’adresse et qui fait des grands signes, ainsi qu’un gros carton… Nos winches !!! Ils sont quand même super sympas, car ce gros carton d’au moins 20 kg n’a pas dû être léger à porter de la base au quai, ils nous l’ont apporté à bord (on se disait déjà que le transfert du quai à l’annexe puis de l’annexe au bateau serait rigolo), alors qu’on n’aurait jamais osé leur demander tout ça…
Du coup on s’est allègrement mis au travail : démontage du deuxième winch (l’étape la plus compliquée, les winches n’ont jamais été démontés depuis 30 ans, les écrous sont cachés sous les vaigrages collés à la résine …), perçage de nouveaux trous, bouchage des anciens, peinture pour faire propre quand même… je vous passe les détails vu qu’on a déjà mis un article sur nos réflexions du soir !!!
Deux petites photos tout de même en complément :
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Bonjour et merci pour ces nouvelles et ces belles photos.
A propos, c’est quoi « faire une épissure sur une chute de cordage »
Bisous
En fait une épissure, c’est pour faire une boucle au bout d’un cordage, ou pour rabouter deux cordages.
Bien sûr, on pourrait faire un nœud, mais l’épissure ça réduit moins la résistance du cordage qu’un noeud.
Et puis c’est joli quand c’est réussi.
Il y a des épissures faciles, sur un cordage à 3 torons : ça, j’arrive à faire. En revanche, ça se complique sacrément quand le cordage est constitué d’une âme et d’une gaine. Je ne mets pas de lien, car il existe des méthodes illustrées pour faire des épissures comme ça, mais ce qu’ils ne disent pas, c’est que chaque étape – qui a l’air facile sur le descriptif – prend une heure de laborieux efforts en réalité…
Coucou !
C’est très chouette, ça donne envie !
Sinon, toujours aussi technique, en tout casn tu fais des supers récits, merci !
Bises.
Virginie (de Savoie au cas où…)
salut
sympa vos impressions sur Baltimore et sherkin. Il y a 6 ans, j y suis allé via les scilly avec 2 potes sur un 7 m. je retrouve l’atmosphère de cette Irlande que j aime tant. pour anecdote on s’est fait surprendre dans l anse de baltimore par le swell la houle a fait déraper notre bateau en pleine nuit. depuis je fais super gaffe au mouillage.
et à Sherkin on avait passé un apéro bien arrosé avec un pilier de bar qui chanter des chansons en gaellic. Bon vent à vous.
Ps : je suis le copain de carole et damien que vous avez rencontré sur la plage de Lorient juste avant votre départ.